Unis autour de la science: Relancer l’action en faveur du climat
Communiqué de presse
18 septembre 2024
Les données scientifiques sont claires. Nous sommes loin d’atteindre les objectifs vitaux en matière de climat. Selon le rapport Unis autour de la science, élaboré par plusieurs institutions sous la direction de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), les effets du changement climatique et des phénomènes météorologiques dangereux réduisent à néant des avancées en matière de développement et menacent les conditions de vie des populations et la planète.
Messages clés
Un rapport pluri-institutions met en lumière tant des défis que des moyens d’agir
Les décisions du Sommet de l’avenir: un choix entre bond en avant et effondrement
L’aggravation des effets du changement climatique réduit à néant des avancées en matière de développement
Le fossé entre les aspirations et la réalité se creuse
Les nouvelles technologies et l’innovation peuvent changer la donne
Les sciences naturelles et les sciences sociales font partie d’une approche transdisciplinaire plus large
Les niveaux de gaz à effet de serre battent des records, tout comme les températures mondiales. S’agissant des émissions de gaz à effet de serre, l’écart entre aspirations et réalité reste élevé. D’après le rapport Unis autour de la science, avec les politiques actuelles, il y a deux tiers de chances que le réchauffement de la planète atteigne 3 °C au cours du siècle actuel.
Toutefois, ce rapport offre des raisons d’espérer dont le besoin se fait fortement sentir. Il explore la manière dont les progrès des sciences naturelles et des sciences sociales, les nouvelles technologies et l’innovation nous permettent de mieux comprendre le système Terre et pourraient changer la donne en matière d’adaptation au changement climatique, de prévention des catastrophes et de développement durable.
«Nous devons prendre d’urgence des mesures ambitieuses pour soutenir le développement durable, l’action climatique et la prévention des catastrophes. Les décisions que nous prenons aujourd’hui pourraient faire la différence entre un effondrement à l’avenir et un bond en avant vers un monde meilleur», a déclaré la Secrétaire générale de l’OMM, Mme Celeste Saulo.
«Nous avons constaté que l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique pouvaient être des technologies transformatrices, qui révolutionnent les prévisions météorologiques en les rendant plus rapides, moins chères et plus accessibles. Les technologies satellitaires de pointe et les réalités virtuelles qui relient le monde physique au monde numérique ouvrent de nouvelles frontières, par exemple dans le domaine de la gestion des sols et de l’eau», a poursuivi Mme Saulo.
«Toutefois, la science et la technologie ne suffisent pas à elles seules à relever des défis mondiaux tels que le changement climatique et le développement durable. Dans un monde de plus en plus complexe, nous devons profiter de la diversité des connaissances, des expériences et des points de vue pour concevoir des solutions ensemble», a-t-elle expliqué.
Selon le rapport, élaboré par un consortium d’organismes du système des Nations Unies, d’organismes météorologiques et d’instituts scientifiques et de recherche, le Sommet de l’avenir, organisé par l’Organisation des Nations Unies, offre une occasion unique de relancer l’engagement collectif en faveur des objectifs mondiaux. Il intègre également les contributions des jeunes et des scientifiques en début de carrière, qui sont des acteurs de changement pour l’avenir.
United in Science 2024 - Key Messages
État des sciences du climat: il est nécessaire de prendre d’urgence des mesures ambitieuses pour le climat
Le changement climatique causé par l’être humain a entraîné des changements rapides et à grande échelle de l’atmosphère, des océans, de la cryosphère et de la biosphère. L’année 2023 a été de loin l’année la plus chaude jamais enregistrée, avec une généralisation des conditions météorologiques extrêmes. Cette tendance s’est poursuivie au premier semestre de 2024.
Les émissions mondiales de gaz à effet de serre ont augmenté de 1,2 % entre 2021 et 2022, atteignant 57,4 milliards de tonnes d’équivalent dioxyde de carbone (CO2). Les concentrations de CO2, de méthane (CH4) et de protoxyde d’azote (N2O) en surface moyennées à l’échelle du globe ont également battu des records.
Lors de l’adoption de l’Accord de Paris, les projections indiquaient que les émissions de gaz à effet de serre augmenteraient de 16 % entre 2015 et 2030. Aujourd’hui, cette augmentation prévue est de 3 %, ce qui indique que des progrès ont été réalisés. Pourtant, l’écart par rapport aux objectifs d’émissions pour 2030 reste élevé. Pour limiter le réchauffement de la planète à moins de 2 °C ou 1,5 °C (par rapport à l’époque préindustrielle), les émissions mondiales de gaz à effet de serre en 2030 devraient diminuer de 28 % ou de 42 %, respectivement, par rapport aux niveaux prévus dans les politiques actuelles.
Grâce aux politiques existantes et aux contributions déterminées au niveau national (CDN) (qui présentent les efforts nationaux visant à limiter l’augmentation des températures mondiales à un niveau nettement inférieur à 2 °C), on estime que le réchauffement de la planète sera maintenu à un maximum de 3 °C tout au long du siècle actuel. Ce n’est que dans le scénario le plus optimiste, qui consiste en une concrétisation de l’ensemble des CDN conditionnelles et des engagements en faveur de l’objectif de zéro émission nette, que le réchauffement de la planète serait limité à 2 °C, avec une probabilité de seulement 14 % de limiter l’augmentation des températures mondiales à 1,5 °C.
Il est probable à 80 % que la température moyenne à la surface du globe dépasse de 1,5 °C les niveaux préindustriels au cours de l’une des cinq prochaines années civiles au moins. De plus, il est probable à 47 % que la moyenne de la période quinquennale 2024-2028 soit supérieure à ce seuil. Le seuil de 1,5 °C fixé dans l’Accord de Paris se réfère au réchauffement à long terme moyenné sur 20 ans.
Il est urgent de prendre des mesures tant d’atténuation du changement climatique que d’adaptation à ses effets.
Cependant, un pays sur six ne dispose toujours pas d’un instrument national de planification de l’adaptation, et un important déficit de financement subsiste, le flux des financements publics internationaux pour l’adaptation enregistrant un fléchissement depuis 2020.
Intelligence artificielle et apprentissage automatique: la révolution des prévisions météorologiques est en marche
Grâce à des progrès rapides, l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique peuvent rendre les modélisations météorologiques de qualité plus rapides, moins chères et plus accessibles aux pays à faible revenu dont les capacités informatiques sont limitées.
Jusqu’à présent, les prévisions météorologiques reposaient sur des modèles physiques utilisés dans le cadre d’un processus appelé «prévision numérique du temps». Les modèles d’intelligence artificielle et d’apprentissage automatique sont entraînés à partir de jeux de données de réanalyse et d’observation, ce qui rend les prévisions météorologiques plus rapides et moins coûteuses. Certaines évaluations ont montré les possibilités qu’offrent l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique pour ce qui est d’obtenir des prévisions de phénomènes dangereux tels que les cyclones tropicaux et des prévisions à plus long terme d’El Niño et de La Niña.
Il existe d’immenses possibilités, mais aussi de nombreux défis, en particulier la faible qualité des données et leur disponibilité limitée. Les modèles actuels d’intelligence artificielle et d’apprentissage automatique n’incluent pas les variables plus difficiles à prévoir liées aux océans, aux terres émergées, à la cryosphère et au cycle du carbone.
Une supervision mondiale forte est nécessaire pour garantir que l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique servent l’intérêt général. Une transparence accrue sera importante pour instaurer la confiance et élaborer des normes garantissant une utilisation responsable.
Observations de la Terre à partir de l’espace
Les progrès incroyables réalisés ces dernières décennies dans le domaine de l’observation de la Terre à partir de l’espace offrent de vastes possibilités pour l’avenir.
Les observations à haute résolution et à haute fréquence du système Terre sont essentielles à l’efficacité des prévisions météorologiques, des prévisions du climat et de la surveillance de l’environnement.
Grâce à des partenariats public-privé, les innovations en matière d’observation de la Terre depuis l’espace peuvent servir à améliorer les applications liées au temps, au climat, à l’eau et à l’environnement.
Néanmoins, d’importants défis limitent la réalisation du plein potentiel de ces observations à l’appui des objectifs mondiaux. Des lacunes subsistent dans la mesure précise des variables essentielles des océans, du climat, des aérosols et de l’eau, ainsi que dans la couverture de zones peu observées telles que la cryosphère.
En outre, l’accessibilité et la normalisation des données constituent un problème, en particulier pour les pays en développement.
Une collaboration internationale, des cadres de gouvernance globaux pour l’intégration des systèmes d’observation ainsi que des modèles de financement innovants sont requis pour soutenir l’observation de la Terre depuis l’espace aux fins des applications liées au temps, au climat, à l’eau et à l’environnement.
Rapprocher les domaines virtuels et physiques: exploiter les technologies immersives pour la gestion de l’eau et des sols
Le changement climatique et ses impacts socio-économiques mettent à rude épreuve les ressources en eau et les ressources terrestres, ce qui menace la sécurité alimentaire et hydrique. Les technologies immersives telles que les jumeaux numériques, la réalité virtuelle et le métavers peuvent révolutionner la gestion intégrée de l’eau et des sols en offrant des solutions interactives et fondées sur des données qui relient le monde physique au monde numérique. Qu’il s’agisse de simuler des inondations et des épisodes de sécheresse ou de prévoir le débit et l’accumulation de l’eau ainsi que la dégradation des sols, elles facilitent la prise de décisions et la mobilisation d’acteurs variés.
Les jumeaux numériques se définissent comme des représentations virtuelles fidèles d’un objet ou un d’un système physique. Le métavers est un écosystème intégré de mondes virtuels qui offre des expériences immersives.
Parmi les défis à relever, on notera des limites en termes de disponibilité et de qualité des données. De plus, l’accès à des mécanismes de financement durables et à des cadres de gouvernance efficaces est insuffisant, tout comme la confiance et la compréhension du public.
La coopération internationale, le partage des connaissances et la mise en place de cadres multilatéraux solides sont essentiels à l’heure d’adopter ces solutions innovantes.
Sur la voie d’un avenir durable: le rôle des approches transdisciplinaires
Les défis mondiaux tels que le changement climatique, la prévention des catastrophes et le développement durable ne peuvent être surmontés avec une seule forme de savoir. Ils nécessitent d’adopter une approche transdisciplinaire, c’est-à-dire de réunir des acteurs de tous les contextes environnementaux, sociaux et culturels pour créer des solutions et les mettre en œuvre ensemble.
Les approches conventionnelles sont souvent axées sur la compréhension d’une seule des dimensions qui relèvent des sciences naturelles, des sciences sociales, du domaine politique et du domaine social.
En revanche, une approche transdisciplinaire s’entend du rassemblement de divers acteurs, tels que des scientifiques, des décideurs politiques, des professionnels et des représentants de la société civile, y compris des communautés locales et autochtones, qui, tous ensemble, acquièrent des connaissances et élaborent des solutions adaptées aux contextes locaux. Ce concept diffère de l’approche multidisciplinaire, au titre de laquelle des experts de différentes disciplines travaillent séparément sur une même question.
Ainsi, le fait d’impliquer dès le départ les scientifiques, les décideurs politiques, les professionnels et les communautés locales et autochtones permet d’avoir une vision plus globale et de mieux comprendre les effets du changement climatique sur le terrain.
Cette démarche renforce également la confiance dans les institutions telles que les Services météorologiques et hydrologiques nationaux (SMHN).
Parvenir à protéger chaque personne sur Terre par des systèmes d’alerte précoce permettant de sauver des vies
Les systèmes d’alerte précoce multidangers sont essentiels pour la protection des vies, des moyens de subsistance et de l’environnement. Il est prouvé que la mortalité liée aux catastrophes est près de six fois plus élevée dans les pays où la couverture de ces systèmes est réduite ou partielle que dans les pays où cette couverture est étendue ou complète.
L’Initiative «Alertes précoces pour tous» (EW4All) vise à garantir que, d’ici à la fin de l’année 2027, chacun sur Terre soit protégé des phénomènes météorologiques, hydrologiques et climatiques dangereux grâce à des systèmes d’alerte précoce capables de sauver des vies. Cette initiative met en relief l’importance de faire une place aux sciences naturelles, aux sciences sociales, aux avancées technologiques et aux approches transdisciplinaires.
L’innovation jouera un rôle central dans l’intensification des actions menées par l’ensemble des parties prenantes à l’appui de l’Initiative EW4All, que ce soit dans le domaine des sciences participatives ou dans celui des disciplines scientifiques, des technologies et des outils, dont l’intelligence artificielle et les plates-formes de communication numériques et multicanaux. En exploitant ces progrès et en veillant à ce qu’ils soient soutenus par des ressources adéquates, nous pouvons réaliser des avancées qui changeront la donne, de façon que les alertes précoces pour tous deviennent une réalité pour les populations du monde entier.
UiS 2024 Logos
United in Science 2024 - Video Summary
Notes aux rédacteurs
Le rapport Unis autour de la science est publié chaque année. Fruit de la collaboration de nombreuses organisations, il présente les dernières avancées en matière de météorologie, de climatologie, d’hydrologie et de sciences environnementales et sociales connexes. Les partenaires qui ont contribué à l’élaboration de l’édition 2024 sont les suivants: OMM, Service météorologique du Royaume-Uni (Met Office), YOUNGO (Groupe officiel des enfants et des jeunes de la Convention‑cadre des Nations Unies sur les changements climatiques), Veille de l’atmosphère globale de l’OMM, Programme mondial de recherche sur la prévision du temps de l’OMM, Programme mondial de recherche sur le climat, Projet mondial sur le carbone (GCP), Programme des Nations Unies pour l’environnement, Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme, Bureau des affaires spatiales de l’Organisation des Nations Unies, Organisation européenne pour l’exploitation de satellites météorologiques, Union internationale des télécommunications, Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification, Conseil international des sciences, Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes, Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et Future Earth.