Plate-forme mondiale pour la réduction des risques de catastrophe: un changement de cap radical s’impose

24 mai 2019

Les incidences du changement climatique, l’élévation du niveau de la mer qui en résulte et les phénomènes météorologiques extrêmes sont en train de s’amplifier en raison du niveau record des concentrations de gaz à effet de serre. Conjugués à l’urbanisation, à la dégradation de l’environnement et au stress hydrique, ces processus engendrent une série de crises interdépendantes. Il ressort du principal forum mondial consacré à la réduction des risques de catastrophe qu’un changement de cap radical s’impose.

Genève, 17 mai 2019 (OMM) – Les incidences du changement climatique, l’élévation du niveau de la mer qui en résulte et les phénomènes météorologiques extrêmes sont en train de s’amplifier en raison du niveau record des concentrations de gaz à effet de serre. Conjugués à l’urbanisation, à la dégradation de l’environnement et au stress hydrique, ces processus engendrent une série de crises interdépendantes. Il ressort du principal forum mondial consacré à la réduction des risques de catastrophe qu’un changement de cap radical s’impose.

«La concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère n’a jamais été aussi élevée depuis 3 millions d’années» a déclaré Petteri Taalas, Secrétaire général de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), aux participants à la Plate-forme mondiale pour la réduction des risques de catastrophe. Les quatre dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées, et le réchauffement à l’œuvre depuis le début de ce siècle devrait se poursuivre du fait de l’augmentation des concentrations de gaz à effet de serre. L’atténuation des changements climatiques est de première importance, au même titre que l’adaptation aux changements climatiques, a souligné le Secrétaire général.

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«L’an dernier, les États-Unis, pour ne citer que ce pays, ont subi 14 catastrophes météorologiques et climatologiques qui ont causé plus de 1 milliard de dollars É.-U de dégâts chacune et coûté au total quelque 49 milliards de dollars É.-U. Plus de 35 millions de personnes dans le monde ont été touchées par des inondations. Cette année, le cyclone tropical Idai a fait plus d’un millier de morts au Mozambique, au Zimbabwe et au Malawi, et quelques semaines plus tard, Kenneth a été le cyclone tropical le plus violent qui ait touché l’extrême nord du Mozambique depuis le début des observations météorologiques modernes» a poursuivi M. Taalas.

La Plate-forme mondiale pour la réduction des risques de catastrophe vise à accélérer les efforts pour renforcer la capacité à faire face aux risques naturels qui, combinés les uns aux autres, déstabilisent ou détruisent chaque année les vies de plusieurs millions de personnes. Cette manifestation est organisée tous les deux ans par le Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes, et la dernière édition a eu lieu du 13 au 17 mai.

M. Taalas a également prononcé une déclaration conjointe au nom du système des Nations Unies, déclarant qu’il était nécessaire «d’opérer un changement de cap radical» pour faire face aux crises mondiales.

«Le temps presse. Comme l’a fait observer le Secrétaire général de l’ONU, `les changements climatiques vont plus vite que nous´. L’urbanisation et l’industrialisation, les pénuries d’eau, la dégradation des terres, la désertification et le déclin de la biodiversité sont quelques-uns des nombreux facteurs, liés entre eux, qui amplifient l’impact des catastrophes et des changements climatiques. Les pays et populations les plus vulnérables subissent déjà de plein fouet leurs effets dévastateurs. Comme nous en avons été témoins au Mozambique, en Inde, en Afrique de l’Est et dans maints autres pays et régions du monde ces dernières années, les risques climatiques et les risques de catastrophe font replonger des millions de personnes dans la pauvreté chaque année. Des millions d’individus sont déplacés. Beaucoup sont laissés sur le bord du chemin» déplore la déclaration conjointe.

«Nous devons redoubler d’efforts pour gérer les risques existants, qui se sont aggravés au fil du temps, tout en empêchant autant que possible l’apparition de nouveaux risques» précise encore la déclaration.

La Plate-forme mondiale vise à accélérer les progrès vers la réalisation des principaux objectifs du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015‑2030), plan mondial adopté en mars 2015 par la communauté internationale dans le but de réduire les pertes causées par les catastrophes.

«Si je devais choisir une phrase pour décrire l’état du monde, je dirais qu’il est marqué par une interpénétration croissante des défis globaux et une fragmentation croissante des réponses; si nous n’inversons pas la tendance, nous courons droit au désastre» prévient le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, António Guterres dans le Rapport d’évaluation mondial sur la réduction des risques de catastrophe 2019, dont la publication avait été planifiée pour coïncider avec la Plate‑forme mondiale.

La Plate-forme mondiale a pour but de passer en revue les progrès accomplis en matière de prévention, d’échanger des connaissances et d’examiner les faits nouveaux et les dernières tendances dans ce domaine.

Conférence sur les alertes précoces multidangers

Les résultats de la deuxième Conférence sur les alertes précoces multidangers (MHEWC-II), tenue sous les auspices de l’OMM, ont alimenté les délibérations de la Plate-forme mondiale. La conférence des 13-14 mai était organisée par les 19 partenaires du Réseau international des systèmes d’alerte précoce multidangers et d’autres organisations.

La Conférence a mis l’accent sur les améliorations à apporter aux dispositifs d’alerte – et aux interventions – permettant de faire face aux phénomènes dangereux que sont les tremblements de terre, les éruptions volcaniques, les phénomènes météorologiques extrêmes et les phénomènes liés à l’eau et au climat, ainsi qu’aux enjeux, étroitement liés entre eux, du changement climatique, de la croissance démographique, de l’urbanisation et de la dégradation de l’environnement. 

«À l’OMM, nous considérons que les systèmes d’alerte précoce sont le moteur de la prévention des catastrophes. Pour prendre une analogie, la prévention des catastrophes peut être comparée à une voiture dont les systèmes d’alerte précoce seraient le moteur» a souligné M. Taalas.

Tout comme le moteur doit faire avancer la voiture jusqu’au dernier kilomètre puis jusqu’au dernier mètre, il est essentiel que les alertes précoces parviennent à ceux qui en ont le plus besoin, a-t-il été expliqué à l’assistance.

La Conférence a été l’occasion de prendre connaissance des initiatives couronnées de succès, mais aussi d’examiner les problèmes à résoudre.

Mussa Mustafa, Directeur général adjoint du Service météorologique et hydrologique national du Mozambique, est revenu sur la catastrophe provoquée par les deux cyclones successifs, d’une violence sans précédent, qui ont fait plusieurs centaines de victimes et causé des destructions massives dans son pays. S’agissant du cyclone Idai, il a expliqué que les populations vivant dans les zones de faible altitude avaient été piégées par les inondations, n’ayant reçu aucune alerte de crue.

Il n’existait pas de plan d’urgence pour affronter des phénomènes d’une telle ampleur. La réaction a été trop lente, et les communications et services de base ont été totalement interrompus. Beira et les régions voisines ont reçu en quelques jours 30 % du volume de précipitations annuel. L’attention s’est excessivement focalisée sur la violence du vent, et pas assez sur les risques d’inondations dus aux pluies torrentielles.

Le cyclone Kenneth a frappé une région peu sujette aux cyclones tropicaux intenses, et il était par conséquent difficile de convaincre les habitants d’évacuer les lieux, a poursuivi M. Mustafa.

Bien que neuf catastrophes liées à des risques naturels sur 10 résultent d’inondations, de tempêtes, de sécheresses, de vagues de chaleur et autres phénomènes météorologiques à fort impact, ce sont les phénomènes géophysiques – tremblements de terre et tsunamis principalement – qui se sont révélés les plus meurtriers au cours des 20 dernières années.

L’Indonésie, qui est située sur la ceinture de feu du Pacifique a enregistré 11 920 tremblements de terre en 2018. Cependant, elle a aussi été frappée par deux tsunamis de triste mémoire causés par des glissements sous-marins et une éruption volcanique, qui ont fait plusieurs centaines de morts. Le système d’alerte précoce du pays n’était opérationnel que pour les tsunamis provoqués par des tremblements de terre, a indiqué Dwikorita Karnawati, responsable du Service indonésien de météorologie, climatologie et géophysique (BMKG). Face aux défis auxquels elle est confrontée, l’Indonésie a décidé d’opter pour un système d’alerte précoce multidangers, a-t-elle ajouté.

La Commission océanographique intergouvernementale de l’UNESCO a souligné que «de nouvelles innovations, de nouveaux investissements et de nouvelles connaissances scientifiques» étaient nécessaires pour améliorer le réseau d’alerte précoce et de surveillance des tsunamis et passer à une approche fondée sur des sources multiples.

La destruction de l’environnement et des écosystèmes a encore aggravé ces problèmes. Le déboisement accroît les risques d’inondation et de glissement de terrain en cas de fortes précipitations et, à cause de la disparition des arbres, accentue les sécheresses.

«On ne peut plus parler ici de risque naturel, mais bien de catastrophe d’origine humaine» a affirmé Pascal Peduzzi, responsable de la base de données sur les ressources mondiales (GRID) du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). «Pour préserver l’environnement, nous avons besoin d’un système d’alerte précoce à un horizon de 10 ans» a-t-il conclu.

Recommandations issues de la deuxième Conférence
sur les alertes précoces multidangers

Lors de la Conférence, les participants ont formulé une série de recommandations sur les mesures à prendre. Un communiqué dans lequel les directeurs des 19 Services météorologiques et hydrologiques nationaux participants réaffirment leur engagement à améliorer les systèmes d’alerte précoce multidangers a également été publié.

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Le dernier kilomètre

Les nouvelles technologies de l’information et de la communication peuvent être mises à profit pour faire en sorte que les alertes parviennent aux collectivités vulnérables. Cependant, les systèmes d’alerte précoce doivent être conçus selon une approche axée sur les individus, afin de pouvoir tenir compte des besoins des utilisateurs, de leur perception du risque et de la façon dont les différents membres de la collectivité accèdent à l’information et la communiquent. Nous devons abandonner les approches descendantes.

«Le comportement humain tient un rôle essentiel dans les systèmes d’alerte. Nous devons placer l’individu au centre» a indiqué David Johnston, de l’Institut GNS Science (New Zealand’s Geological Survey).

Renforcer le lien entre alertes précoces et actions précoces au moyen de prévisions axées sur les impacts

Des progrès considérables ont été accomplis dans le domaine de la prévision météorologique au fil des années, et la prochaine étape consistera à prévoir non plus seulement ce que le temps sera, mais aussi ce qu’il fera – la prévision dite «axée sur les impacts». Des partenariats doivent être établis entre les scientifiques et les chercheurs d’une part et les professionnels de l’action humanitaire et du développement d’autre part afin de garantir que les alertes soient traduites en actions concrètes. Pour s’assurer que les parties concernées comprennent les messages d’alerte précoce et sachent comment y donner suite, les messages doivent leur être communiqués selon des modalités appropriées.

Un représentant du Programme de préparation aux cyclones du Bangladesh – initiative conjointe du Gouvernement bangladais et de la société du Croissant-Rouge – a indiqué que la situation de crise dans les camps de réfugiés des zones côtières de faible altitude avait conduit à la création d’un «système d’alerte précoce ‘gonflé aux stéroïdes’». Grâce aux actions et à la mobilisation collectives, tous les camps avaient pu être préparés à l’arrivée du cyclone tropical Fani au début du mois de mai.

Science, technologie et innovation

La technologie des satellites et la puissance de calcul ont fait progresser la surveillance, la prévision et l’interprétation des dangers. Cependant, il ne sert à rien d’appliquer les plus grandes avancées scientifiques et technologiques si la communication ne suit pas.

«Les systèmes d’alerte précoce doivent être utiles, exploitables et mis en pratique, tenir compte des vrais problèmes des utilisateurs et aider ceux-ci à trouver des solutions viables» a résumé Brian Golding, du Service météorologique britannique (Met Office), lors de la session de clôture.

Étendre la portée des systèmes d’alerte précoce à une multitude d’aléas

En ce qui concerne les systèmes d’alerte précoce multidangers, les participants à la Conférence ont recommandé de procéder par étapes. Ils ont souligné la nécessité de disposer de ressources durables et d’associer dans ce processus progrès technologiques et innovations sociétales. Il faut mettre à profit les savoirs traditionnels, autochtones et locaux et adopter un système à la fois simple et adaptable. Le libre échange des données est une condition cruciale pour pouvoir sauver des vies.

«Les systèmes d’alerte précoce multidangers sont extrêmement complexes. Mais la réalité impose que les citoyens puissent s’appuyer sur les informations qu’ils produisent pour prendre des décisions immédiates; par conséquent, les informations doivent être diffusées selon des modalités qui permettent aux individus de comprendre comment ils peuvent réduire leur exposition au risque et garder la vie sauve et d’agir en conséquence» a souligné Michel Jean, Président de la Commission des systèmes de base de l’OMM.

Évaluer l’efficacité des systèmes d’alerte précoce multidangers

Les participants ont estimé qu’il était nécessaire de mettre en évidence les avantages des systèmes d’alerte précoce et leur intérêt en termes d’investissement.

Magagi Laouan, Ministre nigérien de l’action humanitaire et de la gestion des catastrophes, a expliqué qu’au cours des 40 dernières années, les 3 702 catastrophes répertoriées avaient coûté à son pays plus de 3 milliards de dollars É.-U. Elles ont causé la mort de 10 625 personnes et 17 millions d’animaux d’élevage, et détruit 72 000 habitations et 2,6 millions d’hectares de terres agricoles. Le Niger est maintenant doté d’un système d’alerte précoce. Avec l’appui du Cadre mondial pour les services climatologiques et de l’Initiative sur les systèmes d’alerte précoce aux risques climatiques, connue sous l’acronyme CREWS, les autorités s’emploient à réduire les pertes dues aux conditions météorologiques et climatiques, à améliorer la productivité agricole et à empêcher que la sécheresse ne s’aggrave au point d’être cause de famine.

Les participants ont également appris que la République démocratique du Congo était en train de moderniser son service hydrométéorologique avec le soutien de l’initiative multidonateurs CREWS. Ce projet, d’un coût de 8 millions de dollars É.-U, devrait générer des retombées positives évaluées à 64 millions de dollars É.-U – soit huit fois le coût de départ. Elles profiteront essentiellement à l’agriculture, mais d’autres secteurs en bénéficieront indirectement.

Dans le cadre de son Dispositif mondial de réduction des effets des catastrophes, la Banque mondiale s’attache à améliorer les systèmes d’alerte précoce multidangers des pays en développement, pour un rapport coûts-avantages qu’elle estime à au moins 3:1. L’objectif de son Plan d’action sur l’adaptation au changement climatique et la résilience est de faire en sorte que 250 millions de personnes supplémentaires dans au moins 30 pays en développement aient accès, d’ici 2025, à des données hydrométéorologiques de qualité et à des systèmes d’alerte précoce.

Gouvernance des systèmes d’alerte précoce multidangers

Les messages clés concernent l’importance des cadres juridiques, des politiques générales, de la mobilisation des collectivités et des partenariats entre les universitaires et les secteurs public et privé.

«Les informations météorologiques et scientifiques ne peuvent pas à elles seules réduire les risques de catastrophe si les autorités publiques ne disposent pas d’un cadre approprié et ne savent pas comment elles peuvent agir. Le cadre juridique revêt une importance cruciale. C’est la raison pour laquelle nous devons tous unir nos efforts pour agir» a conclu le Sous-Secrétaire général de l’OMM, Wenjian Zhang.

Pour de plus amples renseignements, veuillez prendre contact avec Clare Nullis, attachée de presse (courriel: cnullis@wmo.int, tél. port.: 41797091397).

Notes aux rédacteurs

Genève, 17 mai 2019 (OMM) – Les incidences du changement climatique, l’élévation du niveau de la mer qui en résulte et les phénomènes météorologiques extrêmes sont en train de s’amplifier en raison du niveau record des concentrations de gaz à effet de serre. Conjugués à l’urbanisation, à la dégradation de l’environnement et au stress hydrique, ces processus engendrent une série de crises interdépendantes. Il ressort du principal forum mondial consacré à la réduction des risques de catastrophe qu’un changement de cap radical s’impose.

«La concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère n’a jamais été aussi élevée depuis 3 millions d’années» a déclaré Petteri Taalas, Secrétaire général de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), aux participants à la Plate-forme mondiale pour la réduction des risques de catastrophe. Les quatre dernières années ont été les plus chaudes jamais enregistrées, et le réchauffement à l’œuvre depuis le début de ce siècle devrait se poursuivre du fait de l’augmentation des concentrations de gaz à effet de serre. L’atténuation des changements climatiques est de première importance, au même titre que l’adaptation aux changements climatiques, a souligné le Secrétaire général.

WMO_SG

«L’an dernier, les États-Unis, pour ne citer que ce pays, ont subi 14 catastrophes météorologiques et climatologiques qui ont causé plus de 1 milliard de dollars É.-U de dégâts chacune et coûté au total quelque 49 milliards de dollars É.-U. Plus de 35 millions de personnes dans le monde ont été touchées par des inondations. Cette année, le cyclone tropical Idai a fait plus d’un millier de morts au Mozambique, au Zimbabwe et au Malawi, et quelques semaines plus tard, Kenneth a été le cyclone tropical le plus violent qui ait touché l’extrême nord du Mozambique depuis le début des observations météorologiques modernes» a poursuivi M. Taalas.

La Plate-forme mondiale pour la réduction des risques de catastrophe vise à accélérer les efforts pour renforcer la capacité à faire face aux risques naturels qui, combinés les uns aux autres, déstabilisent ou détruisent chaque année les vies de plusieurs millions de personnes. Cette manifestation est organisée tous les deux ans par le Bureau des Nations Unies pour la prévention des catastrophes, et la dernière édition a eu lieu du 13 au 17 mai.

M. Taalas a également prononcé une déclaration conjointe au nom du système des Nations Unies, déclarant qu’il était nécessaire «d’opérer un changement de cap radical» pour faire face aux crises mondiales.

«Le temps presse. Comme l’a fait observer le Secrétaire général de l’ONU, `les changements climatiques vont plus vite que nous´. L’urbanisation et l’industrialisation, les pénuries d’eau, la dégradation des terres, la désertification et le déclin de la biodiversité sont quelques-uns des nombreux facteurs, liés entre eux, qui amplifient l’impact des catastrophes et des changements climatiques. Les pays et populations les plus vulnérables subissent déjà de plein fouet leurs effets dévastateurs. Comme nous en avons été témoins au Mozambique, en Inde, en Afrique de l’Est et dans maints autres pays et régions du monde ces dernières années, les risques climatiques et les risques de catastrophe font replonger des millions de personnes dans la pauvreté chaque année. Des millions d’individus sont déplacés. Beaucoup sont laissés sur le bord du chemin» déplore la déclaration conjointe.

«Nous devons redoubler d’efforts pour gérer les risques existants, qui se sont aggravés au fil du temps, tout en empêchant autant que possible l’apparition de nouveaux risques» précise encore la déclaration.

La Plate-forme mondiale vise à accélérer les progrès vers la réalisation des principaux objectifs du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015‑2030), plan mondial adopté en mars 2015 par la communauté internationale dans le but de réduire les pertes causées par les catastrophes.

«Si je devais choisir une phrase pour décrire l’état du monde, je dirais qu’il est marqué par une interpénétration croissante des défis globaux et une fragmentation croissante des réponses; si nous n’inversons pas la tendance, nous courons droit au désastre» prévient le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, António Guterres dans le Rapport d’évaluation mondial sur la réduction des risques de catastrophe 2019, dont la publication avait été planifiée pour coïncider avec la Plate‑forme mondiale.

La Plate-forme mondiale a pour but de passer en revue les progrès accomplis en matière de prévention, d’échanger des connaissances et d’examiner les faits nouveaux et les dernières tendances dans ce domaine.

Conférence sur les alertes précoces multidangers

Les résultats de la deuxième Conférence sur les alertes précoces multidangers (MHEWC-II), tenue sous les auspices de l’OMM, ont alimenté les délibérations de la Plate-forme mondiale. La conférence des 13-14 mai était organisée par les 19 partenaires du Réseau international des systèmes d’alerte précoce multidangers et d’autres organisations.

La Conférence a mis l’accent sur les améliorations à apporter aux dispositifs d’alerte – et aux interventions – permettant de faire face aux phénomènes dangereux que sont les tremblements de terre, les éruptions volcaniques, les phénomènes météorologiques extrêmes et les phénomènes liés à l’eau et au climat, ainsi qu’aux enjeux, étroitement liés entre eux, du changement climatique, de la croissance démographique, de l’urbanisation et de la dégradation de l’environnement. 

«À l’OMM, nous considérons que les systèmes d’alerte précoce sont le moteur de la prévention des catastrophes. Pour prendre une analogie, la prévention des catastrophes peut être comparée à une voiture dont les systèmes d’alerte précoce seraient le moteur» a souligné M. Taalas.

Tout comme le moteur doit faire avancer la voiture jusqu’au dernier kilomètre puis jusqu’au dernier mètre, il est essentiel que les alertes précoces parviennent à ceux qui en ont le plus besoin, a-t-il été expliqué à l’assistance.

La Conférence a été l’occasion de prendre connaissance des initiatives couronnées de succès, mais aussi d’examiner les problèmes à résoudre.

Mussa Mustafa, Directeur général adjoint du Service météorologique et hydrologique national du Mozambique, est revenu sur la catastrophe provoquée par les deux cyclones successifs, d’une violence sans précédent, qui ont fait plusieurs centaines de victimes et causé des destructions massives dans son pays. S’agissant du cyclone Idai, il a expliqué que les populations vivant dans les zones de faible altitude avaient été piégées par les inondations, n’ayant reçu aucune alerte de crue.

Il n’existait pas de plan d’urgence pour affronter des phénomènes d’une telle ampleur. La réaction a été trop lente, et les communications et services de base ont été totalement interrompus. Beira et les régions voisines ont reçu en quelques jours 30 % du volume de précipitations annuel. L’attention s’est excessivement focalisée sur la violence du vent, et pas assez sur les risques d’inondations dus aux pluies torrentielles.

Le cyclone Kenneth a frappé une région peu sujette aux cyclones tropicaux intenses, et il était par conséquent difficile de convaincre les habitants d’évacuer les lieux, a poursuivi M. Mustafa.

Bien que neuf catastrophes liées à des risques naturels sur 10 résultent d’inondations, de tempêtes, de sécheresses, de vagues de chaleur et autres phénomènes météorologiques à fort impact, ce sont les phénomènes géophysiques – tremblements de terre et tsunamis principalement – qui se sont révélés les plus meurtriers au cours des 20 dernières années.

L’Indonésie, qui est située sur la ceinture de feu du Pacifique a enregistré 11 920 tremblements de terre en 2018. Cependant, elle a aussi été frappée par deux tsunamis de triste mémoire causés par des glissements sous-marins et une éruption volcanique, qui ont fait plusieurs centaines de morts. Le système d’alerte précoce du pays n’était opérationnel que pour les tsunamis provoqués par des tremblements de terre, a indiqué Dwikorita Karnawati, responsable du Service indonésien de météorologie, climatologie et géophysique (BMKG). Face aux défis auxquels elle est confrontée, l’Indonésie a décidé d’opter pour un système d’alerte précoce multidangers, a-t-elle ajouté.

La Commission océanographique intergouvernementale de l’UNESCO a souligné que «de nouvelles innovations, de nouveaux investissements et de nouvelles connaissances scientifiques» étaient nécessaires pour améliorer le réseau d’alerte précoce et de surveillance des tsunamis et passer à une approche fondée sur des sources multiples.

La destruction de l’environnement et des écosystèmes a encore aggravé ces problèmes. Le déboisement accroît les risques d’inondation et de glissement de terrain en cas de fortes précipitations et, à cause de la disparition des arbres, accentue les sécheresses.

«On ne peut plus parler ici de risque naturel, mais bien de catastrophe d’origine humaine» a affirmé Pascal Peduzzi, responsable de la base de données sur les ressources mondiales (GRID) du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). «Pour préserver l’environnement, nous avons besoin d’un système d’alerte précoce à un horizon de 10 ans» a-t-il conclu.

Recommandations issues de la deuxième Conférence
sur les alertes précoces multidangers

Lors de la Conférence, les participants ont formulé une série de recommandations sur les mesures à prendre. Un communiqué dans lequel les directeurs des 19 Services météorologiques et hydrologiques nationaux participants réaffirment leur engagement à améliorer les systèmes d’alerte précoce multidangers a également été publié.

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Le dernier kilomètre

Les nouvelles technologies de l’information et de la communication peuvent être mises à profit pour faire en sorte que les alertes parviennent aux collectivités vulnérables. Cependant, les systèmes d’alerte précoce doivent être conçus selon une approche axée sur les individus, afin de pouvoir tenir compte des besoins des utilisateurs, de leur perception du risque et de la façon dont les différents membres de la collectivité accèdent à l’information et la communiquent. Nous devons abandonner les approches descendantes.

«Le comportement humain tient un rôle essentiel dans les systèmes d’alerte. Nous devons placer l’individu au centre» a indiqué David Johnston, de l’Institut GNS Science (New Zealand’s Geological Survey).

Renforcer le lien entre alertes précoces et actions précoces au moyen de prévisions axées sur les impacts

Des progrès considérables ont été accomplis dans le domaine de la prévision météorologique au fil des années, et la prochaine étape consistera à prévoir non plus seulement ce que le temps sera, mais aussi ce qu’il fera – la prévision dite «axée sur les impacts». Des partenariats doivent être établis entre les scientifiques et les chercheurs d’une part et les professionnels de l’action humanitaire et du développement d’autre part afin de garantir que les alertes soient traduites en actions concrètes. Pour s’assurer que les parties concernées comprennent les messages d’alerte précoce et sachent comment y donner suite, les messages doivent leur être communiqués selon des modalités appropriées.

Un représentant du Programme de préparation aux cyclones du Bangladesh – initiative conjointe du Gouvernement bangladais et de la société du Croissant-Rouge – a indiqué que la situation de crise dans les camps de réfugiés des zones côtières de faible altitude avait conduit à la création d’un «système d’alerte précoce ‘gonflé aux stéroïdes’». Grâce aux actions et à la mobilisation collectives, tous les camps avaient pu être préparés à l’arrivée du cyclone tropical Fani au début du mois de mai.

Science, technologie et innovation

La technologie des satellites et la puissance de calcul ont fait progresser la surveillance, la prévision et l’interprétation des dangers. Cependant, il ne sert à rien d’appliquer les plus grandes avancées scientifiques et technologiques si la communication ne suit pas.

«Les systèmes d’alerte précoce doivent être utiles, exploitables et mis en pratique, tenir compte des vrais problèmes des utilisateurs et aider ceux-ci à trouver des solutions viables» a résumé Brian Golding, du Service météorologique britannique (Met Office), lors de la session de clôture.

Étendre la portée des systèmes d’alerte précoce à une multitude d’aléas

En ce qui concerne les systèmes d’alerte précoce multidangers, les participants à la Conférence ont recommandé de procéder par étapes. Ils ont souligné la nécessité de disposer de ressources durables et d’associer dans ce processus progrès technologiques et innovations sociétales. Il faut mettre à profit les savoirs traditionnels, autochtones et locaux et adopter un système à la fois simple et adaptable. Le libre échange des données est une condition cruciale pour pouvoir sauver des vies.

«Les systèmes d’alerte précoce multidangers sont extrêmement complexes. Mais la réalité impose que les citoyens puissent s’appuyer sur les informations qu’ils produisent pour prendre des décisions immédiates; par conséquent, les informations doivent être diffusées selon des modalités qui permettent aux individus de comprendre comment ils peuvent réduire leur exposition au risque et garder la vie sauve et d’agir en conséquence» a souligné Michel Jean, Président de la Commission des systèmes de base de l’OMM.

Évaluer l’efficacité des systèmes d’alerte précoce multidangers

Les participants ont estimé qu’il était nécessaire de mettre en évidence les avantages des systèmes d’alerte précoce et leur intérêt en termes d’investissement.

Magagi Laouan, Ministre nigérien de l’action humanitaire et de la gestion des catastrophes, a expliqué qu’au cours des 40 dernières années, les 3 702 catastrophes répertoriées avaient coûté à son pays plus de 3 milliards de dollars É.-U. Elles ont causé la mort de 10 625 personnes et 17 millions d’animaux d’élevage, et détruit 72 000 habitations et 2,6 millions d’hectares de terres agricoles. Le Niger est maintenant doté d’un système d’alerte précoce. Avec l’appui du Cadre mondial pour les services climatologiques et de l’Initiative sur les systèmes d’alerte précoce aux risques climatiques, connue sous l’acronyme CREWS, les autorités s’emploient à réduire les pertes dues aux conditions météorologiques et climatiques, à améliorer la productivité agricole et à empêcher que la sécheresse ne s’aggrave au point d’être cause de famine.

Les participants ont également appris que la République démocratique du Congo était en train de moderniser son service hydrométéorologique avec le soutien de l’initiative multidonateurs CREWS. Ce projet, d’un coût de 8 millions de dollars É.-U, devrait générer des retombées positives évaluées à 64 millions de dollars É.-U – soit huit fois le coût de départ. Elles profiteront essentiellement à l’agriculture, mais d’autres secteurs en bénéficieront indirectement.

Dans le cadre de son Dispositif mondial de réduction des effets des catastrophes, la Banque mondiale s’attache à améliorer les systèmes d’alerte précoce multidangers des pays en développement, pour un rapport coûts-avantages qu’elle estime à au moins 3:1. L’objectif de son Plan d’action sur l’adaptation au changement climatique et la résilience est de faire en sorte que 250 millions de personnes supplémentaires dans au moins 30 pays en développement aient accès, d’ici 2025, à des données hydrométéorologiques de qualité et à des systèmes d’alerte précoce.

Gouvernance des systèmes d’alerte précoce multidangers

Les messages clés concernent l’importance des cadres juridiques, des politiques générales, de la mobilisation des collectivités et des partenariats entre les universitaires et les secteurs public et privé.

«Les informations météorologiques et scientifiques ne peuvent pas à elles seules réduire les risques de catastrophe si les autorités publiques ne disposent pas d’un cadre approprié et ne savent pas comment elles peuvent agir. Le cadre juridique revêt une importance cruciale. C’est la raison pour laquelle nous devons tous unir nos efforts pour agir» a conclu le Sous-Secrétaire général de l’OMM, Wenjian Zhang.

Pour de plus amples renseignements, veuillez prendre contact avec Clare Nullis, attachée de presse (courriel: cnullis@wmo.int, tél. port.: 41797091397).

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