Le Congrès météorologique mondial a approuvé un nouveau cadre de collaboration sur les océans afin de rationaliser et de renforcer les activités de l’OMM concernant les océans, d’intensifier la coordination et la coopération interinstitutionnelles, et de contribuer à la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable 2021‑2030.
Il a donné son aval à une démarche pluridisciplinaire, englobant recherche, observations, prévisions et prestation de services, conformément à l’approche plus intégrée du système Terre que s’efforce de suivre l’Organisation météorologique mondiale.
Il a approuvé la nouvelle résolution sur les océans à la suite d’une séance de haut niveau consacrée aux informations océaniques à l’appui de services météorologiques, maritimes et climatologiques favorisant la résilience et la durabilité de l’économie bleue.
Les débats se sont articulés autour de quatre grands thèmes:
- Les océans sont la mémoire du système Terre. Plus loin nous voudrons nous projeter, plus il faudra les étudier en profondeur pour avoir accès à cette mémoire.
- L’évolution des températures, de la circulation, de la stratification et de la chimie des océans entraîne un déplacement des espèces vers les pôles et une montée en puissance des facteurs de stress des écosystèmes tels que l’acidification et la désoxygénation des océans.
- La plupart des villes, des populations et des activités économiques sont côtières. La pêche littorale est une importante source d’alimentation. Il est fondamental de comprendre les changements et les phénomènes extrêmes qui interviennent dans les zones côtières pour protéger les personnes, les biens et les moyens de subsistance qui s’y trouvent.
- L’océan est une source d’énergie pour les tempêtes et les cyclones. Améliorer les prévisions relatives aux tempêtes, aux ondes de tempête, aux vagues et à d’autres phénomènes extrêmes assure la sécurité du secteur maritime et des populations côtières.
«La météorologie nous renseigne de façon cruciale sur les océans», a indiqué l’Envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour l'océan, M. Peter Thomson, dans un message vidéo diffusé lors du Dialogue sur les océans.
«La santé des océans est en danger», a-t-il ajouté en citant le plastique, la pollution urbaine et industrielle, la pêche excessive et, élément le plus pernicieux, le changement climatique, facteur d’acidification, de désoxygénation, de réchauffement et de destruction des coraux.
«Nous avons un ennemi commun: nos émissions de gaz à effet de serre», a-t-il affirmé, en précisant que les 12 prochaines années seraient déterminantes pour prendre des mesures visant à contenir la menace que représente le changement climatique. «L’Histoire jugera durement ceux qui ne s’associent pas à ces efforts communs pour le bien commun», a-t-il déclaré.
«Les océans couvrent les deux tiers de la planète, stockent 93 % de l’excédent de chaleur généré par les activités humaines et sont de grands puits de dioxyde de carbone. Ils se sont réchauffés de 0,5° C depuis le début de l’ère industrielle», a indiqué le Secrétaire général de l’OMM, M. Petteri Taalas.
«Le changement climatique a des répercussions sur les courants océaniques, et le réchauffement de l’eau de mer augmente les chances de cyclones tropicaux intenses. L’élévation du niveau de la mer multiplie les risques d’inondations côtières et d’ondes de tempête», a-t-il fait remarquer.
«La nécessité de renforcer les synergies, la flexibilité et l’intégration des sciences du système Terre motive le programme de réforme de l’OMM et le resserrement de la collaboration avec des partenaires tels que la Commission océanographique intergouvernementale (COI) de l’UNESCO», a-t-il annoncé.
Selon le projet de réforme de l’OMM, un conseil de concertation OMM/COI coordonnera l’élaboration, l’intégration et la mise en œuvre des activités liées à l’observation océanographique et météorologique, à la gestion des données et de l’information, aux services, aux systèmes de modélisation et de prévision, de même qu'à la recherche et au renforcement des capacités.
M. Peter Haugan, Président de la COI de l’UNESCO, a indiqué que ce nouveau conseil de concertation associerait une direction en cascade à des compétences spécialisées venues de la base afin de tirer parti des avantages procurés par les nouvelles technologies et les partenariats public-privé, de façon à faire face aux défis croissants et à contribuer à une économie maritime durable.
«Nous voulons faire de l’océanographie un service pour l’humanité. Le moment est venu d’adapter la science des océans aux océans que nous voulons», a déclaré le Secrétaire exécutif de la COI, M. Vladimir Ryabinin.
M. Hiroyuki Yamada, Directeur de la Division du milieu marin de l’Organisation maritime internationale (OMI), a fait savoir que son organisation s’engageait en faveur de la réduction d’au moins 50 % des émissions annuelles de gaz à effet de serre des navires d’ici 2050 par rapport à 2008, tout en poursuivant parallèlement ses efforts pour les réduire à zéro. Plus de 80 % de biens échangés au plan mondial sont acheminés par bateau.
«La coopération entre l’OMM et la COI de l’UNESCO est essentielle pour que l’OMI accomplisse son mandat et pour que la navigation soit sûre et efficace sur des océans propres et sains», a dit M. Yamada.
«Les océans jouent un rôle fondamental dans l’évolution de notre planète», a expliqué Mme Julia Slingo, Conseillère spéciale sur le climat auprès du Secrétaire général de l’OMM, qui a mis l’accent sur les lacunes persistantes en matière de compréhension du rôle des océans dans le système Terre à toutes les échelles temporelles (de la météorologie à la climatologie), ainsi que sur les solutions potentielles qui se présentent sous la forme de systèmes et modèles d’observation plus avancés et de nouveaux capteurs.
«N’oublions pas les océans. Lorsqu’il pleut, que le vent souffle ou que nous prenons une grande inspiration, nous devons penser aux océans. Non seulement ceux qui habitent en bord de mer, mais aussi ceux qui vivent loin dans les terres devraient penser aux océans», a déclaré Mme Slingo, soulignant ainsi le rôle fondamental des océans pour toutes les prévisions météorologiques.
Mme Dwikorita Karnawati, Représentante permanente de l’Indonésie, a relaté la difficulté de fournir des services côtiers et maritimes à plus de 260 millions de personnes réparties sur plus de 17 000 îles dans une région connue pour son activité volcanique et sismique.
En moyenne, il se produit 4 000 à 5 000 séismes par an en Indonésie. On en a recensé 7 500 en 2017 et 11 920 en 2018. Deux tsunamis distincts déclenchés par un tremblement de terre à Sulawesi ainsi qu’une éruption volcanique et un glissement de terrain sous-marin dans le détroit de la Sonde ont fait des milliers de blessés en Indonésie en 2018.
«Ces catastrophes ont mis en avant l’importance de disposer d’un système harmonisé d’observations, de données et de communication», a signalé Mme Karnawati. Actuellement, différents organismes sont responsables de différents types de données, mais le gouvernement cherche à réformer le système.
«Agir sans données revient à piloter un avion à l’aveugle,» a déclaré Mme Karnawati.
M. Thomas Cuff, Directeur du Bureau des observations de l’Administration américaine pour les océans et l'atmosphère (NOAA), a détaillé les dernières avancées dans le domaine de la modélisation et de la prévision océaniques.
M. François Gérard, de l’Association française pour la prévention des catastrophes naturelles, a présenté un exposé sur la question des observations océaniques.
La résolution adoptée par le Congrès prévoit de restructurer le programme d’action de l’OMM sur les océans pour soutenir le plan opérationnel 2020-2023 de l’Organisation avec les objectifs spécifiques suivants:
- Renforcer le Système mondial d’observation de l’océan (GOOS), dans le cadre des activités d’observation et de traitement des données de l’OMM, et favoriser les observations météorologiques et océanographiques dans les régions côtières et en haute mer;
- Encourager la modélisation du système Terre – couplage des océans avec les terres émergées, la cryosphère et l’atmosphère – pour faire progresser la science et améliorer les prévisions et les services: tirer parti de la Décennie des Nations Unies pour les sciences océaniques au service du développement durable;
- Promouvoir les sciences océaniques, afin d’appuyer la chaîne de valeur du Système mondial de traitement des données et de prévision sans discontinuité, et accroître les retombées socio-économiques des services océanographiques et de météorologie maritime;
- Mieux intégrer la thématique des océans aux systèmes d’alerte précoce multidanger, dans le contexte de la prévention des catastrophes, des applications et des services climatologiques de l’OMM et des activités de recherche (tempêtes tropicales, cyclones, élévation du niveau de la mer et autres facteurs d’inondation côtière, par exemple);
- Améliorer les capacités des pays en développement, notamment les petits États insulaires en développement, dans les domaines de l’observation, de la science et des services océaniques, par un renforcement de la coordination régionale.