Trois caractéristiques des modèles numériques déterminent le développement de la prévision météorologique opérationnelle

27 novembre 2019
  • Author(s):
  • Rucong Yu, Jian Li et Pengqun Jia

La prévision météorologique opérationnelle a atteint un stade critique. Il se peut en effet qu'elle soit redéfinie par trois caractéristiques des modèles numériques: leur caractère indispensable, leur inexactitude et leur incomplétude. Le caractère indispensable des modèles numériques est l'une des principales caractéristiques de la prévision météorologique opérationnelle actuelle. Cependant l'inexactitude est inhérente à la plupart des systèmes numériques, et l'incomplétude demeurera une caractéristique permanente des modèles numériques en raison de l'extrême complexité du système terrestre.

Les qualités intrinsèques de ces trois caractéristiques des modèles numériques déterminent non seulement l'état d'avancement du développement météorologique, mais aussi le cadre futur de la prévision météorologique opérationnelle. Le caractère indispensable des modèles numériques fait référence à leur capacité et leur potentiel de décrire l'évolution de l'atmosphère ou du système terrestre – un principe clé de tout plan stratégique pour le développement de la météorologie. Mais leur inexactitude et leur incomplétude signifient que les produits issus directement de la prévision numérique du temps (PNT) présentent des incertitudes. En conséquence, une exploitation actualisée devrait mettre l'accent sur la limitation des incertitudes inévitables. L'inexactitude signifie que des mesures devraient être prises pour améliorer la précision de la PNT dans les centres météorologiques. L'incomplétude, quant à elle, souligne que la recherche sur la modélisation du système terrestre doit s'intensifier.

Une ère nouvelle pour la prévision

Depuis la fin du XXe siècle, l'Académie des sciences des États-Unis (NAS) a cherché à déterminer comment les Services météorologiques nationaux peuvent, en permanence, améliorer la prévision météorologique et les produits et services connexes (National Research Council, 1999). Dans une feuille de route pour l'avenir, la NAS souligne la nécessité de poursuivre le processus de modernisation et évoque les possibilités qui s'offrent en la matière. Dans un récent document de synthèse (Benjamin et al., 2019) qui retrace l'évolution de la prévision au cours des 100 dernières années – en les divisant en quatre périodes distinctes –, il est indiqué que les 30 prochaines années constitueront une ère nouvelle, qui se caractérisera notamment par une automatisation accrue du processus de prévision et par une complexité croissante à toutes les échelles spatio-temporelles pour ce qui concerne la prévision météorologique environnementale numérique.

La déclaration faite à l'occasion du Dix-huitième Congrès météorologique mondial (Cg‑18) selon laquelle l'OMM se trouve à un tournant important de son histoire est conforme aux idées mentionnées ci-dessus. Le Dix-huitième Congrès a d'ailleurs approuvé une réforme fondamentale de la gouvernance visant à faire de l'OMM une organisation mieux intégrée et prête à fonctionner dans un cadre du système terrestre sans discontinuité et englobant ses principaux domaines d'activité, à savoir le temps, le climat, l'eau et l'environnement. Certains changements auront donc lieu en ce qui concerne la prévision du temps et les processus connexes.

La question de savoir s'il serait possible de faire des prévisions météorologiques fondées sur des principes scientifiques et mathématiques a été longuement débattue il y a plus de 100 ans. Les avancées théoriques qui ont eu lieu depuis lors ont permis de mieux comprendre la dynamique de l'atmosphère et les processus physiques en jeu, ce qui sert de fondement aux modèles numériques et contribue grandement à l'amélioration continue de la PNT opérationnelle. Prenant pour exemple l'évolution des produits de réanalyse, la figure 1 montre les précipitations climatiques estivales pour la période 1979–2002 tirées des produits du Projet mondial de climatologie des précipitations (GPCP) et de différents produits de réanalyse en Asie orientale. Les précipitations obtenues à l'aide des données de réanalyse peuvent refléter la capacité des modèles numériques à simuler tous les processus liés aux précipitations. Comme le montre la figure 1, en comparaison du GPCP, ERA40 (fondé sur un modèle mis en service en 2001) sous-estime très nettement les précipitations en Asie orientale, et particulièrement dans le sud-est de la Chine. En revanche, ERAIM (fondé sur un modèle mis en service en 2006) surestime les précipitations dans le sud-est de la Chine. Quant à ERA5 (2016), il reproduit assez bien l'intensité et la répartition des précipitations observées. Les différences entre les trois générations de données de réanalyse mettent en évidence les améliorations considérables apportées aux systèmes de modélisation numérique au fil des ans.

Qualités intrinsèques des modèles numériques

Figure 1. Climatic summer ((June, July and August)) precipitation (1979–2002)

Figure 1. Précipitations climatiques estivales (juin, juillet et août) pour la période 1979–2002, tirées des produits du GPCP et de différents produits de réanalyse (ERA40, ERAIM et ERA5)

Trois caractéristiques – caractère indispensable, inexactitude et incomplétude – sont inhérentes aux modèles numériques. Ces modèles sont indispensables à la prévision météorologique moderne et seront, à l'avenir, le principal fondement d'une exploitation numérique sans discontinuité. En accord avec le cadre sans discontinuité propre au système terrestre et correspondant à l'ère nouvelle, les modèles de PNT progressent vers une modélisation éprouvée de ce système.

Toutefois, le système terrestre est une structure hiérarchique complexe, et son système de modélisation numérique est également complexe. En conséquence, l'inexactitude et l'incomplétude seront toujours inhérentes aux modèles numériques quels qu'ils soient et engendreront des incertitudes à long terme en matière de PNT. Cette incertitude permanente détermine la direction dans laquelle se développe la météorologie, de même que le cadre futur de la prévision météorologique opérationnelle.

Caractère indispensable: Comme l'indique Charney (1951), «l'atmosphère ne présente pas de périodicités qui permettraient de prévoir le temps comme on peut prévoir les marées». Au lieu de résulter d'un ensemble simple de relations de cause à effet, tous les phénomènes atmosphériques sont le résultat des influences complexes d'une combinaison de facteurs non synchrones, non uniformes et hors d'équilibre. En raison de la complexité extrême des processus atmosphériques, seul un modèle numérique a la capacité et le potentiel d'appréhender sous tous ses aspects le forçage multi‑échelle et non linéaire et de décrire l'évolution de l'atmosphère. Tandis que la modélisation numérique achevait de se développer ces 30 dernières années, la PNT – à laquelle on procède chaque jour dans les grands centres opérationnels – est devenue incontestablement prédominante dans le processus de prévision. Le caractère indispensable des modèles numériques a donc été une caractéristique marquante de la prévision opérationnelle moderne.

Inexactitude: Le point de départ d'un modèle numérique est une série de lois fondamentales régissant la dynamique de l'atmosphère: deuxième loi du mouvement de Newton, première loi de la thermodynamique et loi de la conservation de la masse. Pour être stockées et traitées sur un ordinateur, les variables continues présentes dans les équations décrivant les lois fondamentales doivent être présentées sous forme discrète. Cette discrétisation spatiale et temporelle peut entraîner des erreurs. Dans les modèles numériques, seules les perturbations excédant une certaine échelle spatiale prédéfinie sont explicitement prises en compte. Les effets des processus à plus petite échelle doivent alors être estimés à partir de l'état du modèle à plus grande échelle, ce que l'on qualifie de paramétrage.

Même dans le cas des modèles à résolution horizontale de plusieurs kilomètres, de nombreux processus (microphysique des nuages, transfert radiatif, turbulence, cumulus minces, etc.) doivent encore être paramétrés. Or le paramétrage entraîne toujours des biais importants. Par exemple, le changement de phase de l'humidité, qui est un processus clé pour la plupart des phénomènes météorologiques et climatiques, est paramétré, ce qui donne lieu à des biais importants dans les modèles.

De nombreux processus tels que le flux de surface, la convection des cumulus, la microphysique des nuages et le rayonnement sont nécessaires pour décrire le changement de phase de l'humidité et ses influences. Du fait de leur extrême complexité et des connaissances limitées à leur sujet, les processus liés à l'humidité tels que les nuages et les rétroactions qui leur sont associées demeurent la plus grande source d'incertitude des modèles. Outre le modèle lui-même, l'état initial du modèle comporte aussi des biais dus aux données d'observation. En bref, l'inexactitude est bien ancrée dans les modèles numériques et la prévision numérique.

Incomplétude: L'atmosphère est fortement influencée par les autres composantes du système terrestre. Les océans, la cryosphère, la surface des terres émergées, l'hydrologie, la composition et les écosystèmes ont tous un effet important sur la prévision météorologique. Certaines interactions environnementales ont été prises en compte dans les systèmes de prévision numérique depuis des décennies. Les progrès des modèles de l'atmosphère ont permis de mettre en œuvre un nombre croissant de processus d'interaction des différentes composantes du système terrestre et de régler plus de détails de ces processus.

Le modèle du système terrestre est une tentative d'intégration de tout ce que l'on connaît au sujet de ce système, qui comprend l'atmosphère, la biosphère, la géosphère, l'hydrosphère et la cryosphère, ainsi que toutes les relations réciproques et rétroactions entre elles. Toutefois, nos connaissances actuelles à propos des interactions des diverses composantes sont loin d'être suffisantes. Beaucoup de processus importants ne sont toujours pas pris en compte dans les systèmes modélisés. De plus, la demande de description des interactions s'est accrue rapidement avec l'amélioration des modèles numériques. Par exemple, après être passé à une résolution à l'échelle des phénomènes de convection, il devient de plus en plus important d'assurer une représentation réaliste des effets des grandes villes pour obtenir des prévisions fiables de la température et des précipitations. L'incomplétude des modèles numériques est profondément liée à l'extrême complexité de l'évolution du système terrestre à différentes échelles.

Nouveau cadre pour la prévision météorologique opérationnelle

Figure 2. Nouveau cadre de la prévision météorologique opérationnelle

Figure 2. Nouveau cadre de la prévision météorologique opérationnelle

Le cadre de la prévision météorologique opérationnelle devrait être actualisé et redéfini. Du fait de son caractère indispensable, le modèle numérique du système terrestre occupera certainement une place centrale dans la prévision opérationnelle au cours de la période sans discontinuité qui s'annonce. La poursuite de la recherche et du développement est le seul moyen de remédier à l'inexactitude et à l'incomplétude des modèles numériques. Les trois grandes caractéristiques de ces modèles mettent en évidence les besoins en matière de recherche de l'entreprise météorologique dans son ensemble. Comme le montre la figure 2, le nouveau cadre de la prévision météorologique opérationnelle peut être divisé en quatre parties.

Plan stratégique: vers la modélisation d'un cadre du système terrestre parfait et sans discontinuité: Dans le quart inférieur de la figure 2, le caractère indispensable du modèle numérique détermine le plan stratégique de la prévision opérationnelle future: mettre en place un cadre de modélisation du système terrestre fiable et sans discontinuité et utiliser au mieux et de manière objective les résultats de modèle. C'est le principe premier qui doit guider la conception des tâches en matière de recherche scientifique, de développement technique et d'exploitation. Les quarts droit et gauche de la figure 2 montrent les actions à envisager pour améliorer les systèmes actuels de modélisation numérique, qui tendent à la précision et à la perfection. Le quart supérieur correspond aux efforts visant à optimiser les résultats de la PNT compte tenu des incertitudes.

Renforcement des capacités aux fins d'amélioration de la précision des modèles: Le quart droit de la figure 2 fait ressortir la nécessité d'améliorer la précision du système de modélisation et de mettre au point des expressions mathématiques et des techniques numériques plus exactes et plus efficaces. Il conviendrait d'augmenter la résolution spatio-temporelle, d'entreprendre des travaux de recherche météorologique fondamentale sur les processus physiques et chimiques et de mettre au point des méthodes d'assimilation des données d'une plus grande fiabilité. Étant donné la demande nouvelle de prévisions sans discontinuité, il faudrait concevoir et mener une évaluation novatrice et plus fine pour comprendre et détecter la cause des biais présents dans le système de modélisation. Parallèlement, il faudrait mettre sur pied et conduire des campagnes sur le terrain visant à favoriser la compréhension des principaux processus dynamiques et physiques de l'atmosphère et à améliorer les performances des modèles. C'est ainsi qu'en Chine ont été menés la troisième expérience scientifique dans l’atmosphère au-dessus du plateau tibétain (TIPEX-III) (Zhao et al., 2018) et le Projet de recherche-développement sur les fortes pluies de mousson dans le sud de la Chine (SCMREX) (Luo et al., 2017).

Il conviendrait aussi d'actualiser le système opérationnel de PNT afin de le rendre plus précis. Par exemple, en ce qui concerne la prévision à courte échéance, il faudrait utiliser des modèles régionaux à haute résolution avec des processus de moyenne échelle simulés de manière explicite. À cette échelle spatio-temporelle, l'accent est mis sur sur le cycle d'actualisation rapide et la prise en compte des forçages à très petite échelle liés par exemple à des limites urbaines ou montagneuses complexes.

Figure 3. Mean observed

Figure 3. Moyenne observée (a) et prévision à échéance de 12 à 36 h du modèle relevant du Système intégré de prévision du CEPMMT (b) pour ce qui concerne la pluviosité journalière moyenne (en mm/j) dans l'ouest de la Chine en mai et juin 2019. La région cible, située sur le bord septentrional du bassin du Sichuan, est représentée par un carré tracé en pointillé. (c) Courbes diurnes moyennes régionales de la pluviosité cumulée correspondant aux épisodes de fortes pluies (dont l'intensité pendant les heures de pluviosité maximale est supérieure à 5 mm/3 h) d'après les observations (courbe noire) et la prévision du modèle (courbe bleue). (d) Pourcentage moyen régional de la précipitation totale en fonction de l'intensité horaire d'après les observations (courbe noire) et la prévision du modèle (courbe bleue).

Renforcement des capacités dans le but de compléter les composantes du système terrestre: Le quart gauche de la figure 2 montre la nécessité de compléter les composantes du système terrestre. Il conviendrait d'analyser les interactions des divers sous-systèmes. Il faudrait envisager une méthode assurant un couplage efficace de toutes les composantes et concevoir un mode d'assimilation des données couplées qui permette de combiner au mieux les observations disponibles de l'ensemble du système terrestre. Pour faire progresser les connaissances scientifiques sur le climat et le système terrestre, il importerait de prévoir et de mener des observations à long terme, continues, stéréoscopiques et intégrées des principales composantes (atmosphère, hydrosphère, cryosphère, surface des terres émergées et biosphère) ainsi que de leurs interactions.

L'Administration météorologique chinoise (CMA) a choisi cinq observatoires disposant «d'une bonne représentativité climatique, de données d'observation historiques complètes et de conditions de base éprouvées de leurs stations d'observation» afin de mener une expérience pilote à titre d'observatoires climatologiques nationaux depuis 2006. En 2019, la CMA a chargé 24 observatoires climatologiques nationaux de réaliser des observations continues du système terrestre. Ces 24 observatoires couvrent des surfaces sous-jacentes types (prairies, forêts, terres agricoles, montagnes, terres humides, déserts, étendues marines, lacs, zones urbaines, etc.) et représentent les caractéristiques météorologiques et climatologiques de 16 zones clés du système climatique de la Chine. Les observations à long terme réalisées par ces stations favoriseront les études concernant les échanges de masse, d'humidité et d'énergie ainsi que les interactions au sein du système terrestre et fournissent également des mesures fiables pour l'évaluation du système de modèles couplés.

Le modèle du système terrestre «dans son ensemble» devrait être utilisé pour obtenir des prévisions météorologiques et environnementales sans aucune discontinuité. À mesure que la résolution du modèle augmente, un plus grand nombre de caractéristiques de l'océan, des glaces de mer et de la surface des terres émergées seront simulées, et une série beaucoup plus importante de processus chimiques et biologiques devraient être pris en compte et correctement reproduits.

Fonctionnement en temps réel: déceler les incertitudes dans les produits et concevoir des corrections et des algorithmes objectifs: La prévision opérationnelle en temps réel mettra l'accent sur les incertitudes du système de prévision numérique, correspondant au quart supérieur de la figure 2. En premier lieu, il est nécessaire d'acquérir une meilleure compréhension scientifique des phénomènes météorologiques et climatiques à une échelle réduite et de manière intégrée. En second lieu, il est nécessaire de parvenir à des mesures précises pour évaluer le comportement des modèles clés et les processus essentiels et pour comprendre les incertitudes. En dernier lieu, sur la base d'une évaluation approfondie, il est nécessaire d'utiliser au mieux les mégadonnées et de mettre au point de nouvelles techniques automatiques intelligentes permettant de procéder à une correction objective des produits fournis par le système de prévision numérique. En appliquant une validation et une correction de pointe, un prévisionniste est en mesure de réduire au minimum les incertitudes du système actuel de modélisation numérique et de produire des prévisions de haute qualité.

La prévision des épisodes de fortes pluies sur le bord septentrional du bassin du Sichuan (dans le sud-ouest de la Chine) est présentée à titre d'exemple à la figure 3. La comparaison entre la répartition journalière moyenne des pluies pour la période pré‑estivale (mai et juin) tirée de l'analyse récapitulative des précipitations pour la Chine (CMPA) (voir la figure 3 (a)) et celle fournie par la prévision à 24 heures (12 à 36 h) du CEPMMT (voir la figure 3 (b)) révèle que la prévision du modèle reproduit globalement les foyers de fortes précipitations observés dans le sud-ouest de la Chine. L'emplacement et l'ampleur des foyers de précipitations sont, en particulier, comparables dans la région cible (représentée par un carré tracé en pointillé dans la figure 3).

Cependant, si l'on tient compte des caractéristiques infraquotidiennes des précipitations, on note la présence de biais évidents dans la prévision du modèle. S'agissant de la variation diurne des épisodes de fortes pluies (dont l'intensité pendant les heures de pluviosité maximale est supérieure à 5 mm/3 h), l'heure de pluviosité maximale indiquée par le modèle précède de 3 heures celle réellement observée (voir la figure 3 (c)). En ce qui concerne la répartition des hauteurs de pluie en fonction de l'intensité, le modèle a tendance à surestimer (sous-estimer) la hauteur cumulée des faibles (fortes) précipitations (voir la figure 3 (d)). Une fois les biais du modèle connus, il est possible d'établir des relations infraquotidiennes (cycle diurne et structure d'intensité) entre les résultats du modèle et l'observation. À l'aide de ces relations, il se révèle possible de procéder à la correction des résultats du modèle pour un épisode de fortes pluies donné en deux étapes: premièrement, l'évolution temporelle est retardée de 3 heures à partir du début de cet épisode le 27 juin 2019 à 0200 h (heure locale); deuxièmement, la répartition de la hauteur de pluie en fonction de l'intensité pour chaque résultat du modèle sur 3 heures est ajustée. À l'aide de ces relations, il se révèle possible de procéder à la correction des résultats du modèle pour un épisode de fortes pluies donné en deux étapes: premièrement, l'évolution temporelle est retardée de 3 heures à partir du début de cet épisode le 27 juin 2019 à 0200 h (heure locale); deuxièmement, la répartition de la hauteur de pluie en fonction de l'intensité pour chaque résultat du modèle sur 3 heures est ajustée.

La figure 4 compare la prévision initiale du modèle du CEPMMT et les résultats corrigés avec les observations pour ce qui concerne un épisode de fortes pluies dans la région cible. Comme on peut le contaster, en réduisant la part des faibles précipitations, la faible pluviosité autour du foyer de fortes pluies est en partie éliminée, et les précipitations sont plus intenses dans les principaux foyers. On observe aussi que, à une échelle infraquotidienne, l'heure de pluviosité maximale corrigée concorde avec les observations (voir la figure 4(e)). La répartition de la pluviosité moyenne régionale en fonction de l'intensité (voir la figure 4(f)) après correction (courbe rouge) est plus réaliste en comparaison des résultats initiaux du modèle (courbe bleue).

Figure 4. Répartition de la pluviosité cumulée observée

Figure 4. Distribution of observed (a), model forecast (b) and correction of accumulated rainfall model outputs of the heavy rainfall event from 0200 LT on 27 June 2019 to 2300 LT on 28 June 2019. (e) Temporal evolution of regional averaged rainfall during the heavy rainfall event from observation (black line), ECMWF forecast (blue line) and ECMWF forecast after correction (red line). (f) Same as (e), but for the accumulated regional mean rainfall amount of precipitation with different hourly intensity.

La voie à suivre

Sur la base d'une compréhension en profondeur des qualités intrinsèques des modèles numériques (leurs trois caractéristiques), une stratégie est proposée pour la prévision météorologique opérationnelle à l'aube de l'ère nouvelle qui s'annonce. Le caractère indispensable des modèles numériques a conforté leur position centrale dans les systèmes opérationnels.

Trois directions devraient être privilégiées pour surmonter les incertitudes intrinsèques du modèle. Pour limiter l'inexactitude, il conviendrait d'améliorer la précision du système de modélisation, compte tenu des principaux biais en matière de simulation et de prévision. Pour remédier à l'incomplétude, il importerait de déceler les nouveaux processus clés propres au climat ou au système terrestre, de les comprendre et de les intégrer au mieux dans le système de modélisation. Pour faire le meilleur usage possible des modèles numériques d'une qualité éprouvée qui s'avèrent indispensables, il faudrait, en outre, évaluer avec soin leurs résultats et les corriger en fonction des écarts inhérents. Ces trois directions sont étroitement liées et s'articulent autour d'un même élément central: la recherche, qui est essentielle à l'essor du développement de la prévision opérationnelle.

Remerciements

Nous tenons à remercier Zhang Wenjian, Paolo Ruti, Zhou Heng, Xu Xianghua et Na Xiaodan pour leurs commentaires utiles sur le manuscrit.

Références

Benjamin, S. G., J. M. Brown, G. Brunet, P. Lynch, K. Saito et T. W. Schlatter, 2019: 100 years of progress in forecasting and NWP applications. In: A Century of Progress in Atmospheric and Related Sciences: Celebrating the American Meteorological Society Centennial, Meteorological Monographs, Vol. 59. Boston, American Meteorological Society.

Charney, J. G., 1951: Dynamic forecasting by numerical process. In: Compendium of Meteorology (publié sous la direction de T.F. Malone). Boston, American Meteorological Society.

Luo, Y., R. Zhang, Q. Wan et al., 2017: The Southern China Monsoon Rainfall Experiment (SCMREX). Bulletin of the American Meteorological Society, 98(5):999–1013.

National Research Council, 1999: A Vision for the National Weather Service: Road Map for the Future. National Academies Press.

Zhao, P., X. Xu, F. Chen et al. (2018): The third atmospheric scientific experiment for understanding the Earth–atmosphere coupled system over the Tibetan Plateau and its effects. Bulletin of the American Meteorological Society, 99(4):757–776.

Auteurs

Rucong Yu, Administration météorologique chinoise (CMA)

Jian Li, Laboratoire principal d'État sur les phénomènes météorologiques dangereux, Académie chinoise des sciences météorologiques

Pengqun Jia, Centre de formation de la CMA

    Partager :